Les Chantiers de la Liberté

Idées et analyses sur les dynamiques politiques et diplomatiques.

De Munich à Munich

Les nuages noirs de lhistoire européenne viennent à  nouveau de s’abattre sur le destin de lUkraine.

 

Le 29 septembre 1938, Adolf Hitler annonçait son intention de » libérer »  les populations  allemandes des Sudètes de « loppression tchécoslovaque ». Quelques jours plus tard, ces territoires ,octroyés 20 ans plus tôt à la Tchécoslovaquie par le traité de Saint-Germain-en-Laye, étaient annexés  par le Reich,  avec le funeste consentement de Daladier et de Chamberlain, convoqués pour la circonstance à Munich.

 

Lundi soir 21 février 2022, Poutine,après trois mois de bras de fer avec les Occidentaux,décidait den finir avec « les lois discriminatoires à lencontre des russophones d’Ukaine « , un pays dont il nie toute légitimité en dehors de la mère Russie.

 Les enclaves séparatistes du Donbass contrôlées par le Kremlin depuis la première guerre de 2014 ,sont désormais officiellement reconnues comme « Républiques Populaires «  indépendantes ,et le soir même   larmée Russe y a fait officiellement son entrée,  pour une mission dite de « maintien de la paix». En cas de réaction des autorités de Kiev, considérées elles aussi comme illégitimes,le prétexte sera tout trouvé pour une invasion de la totalité de l’Ukraine, une invasion méthodiquement préparée  depuis des mois par le déploiement de  150 000 soldats russes encerclant le pays.

Exit  l’intégrité territoriale d’un État souverain , exit les accords de Minsk qui prévoyaient,avec la garantie de la France et de l’Allemagne,un règlement pacifique du statut du Donbass : place à la guerre.

 

Ironie de l’Histoire, à la veille même du coup de force de Poutine, le gratin de l’OTAN, vice- présidente des États Unis en tête,s’étaient réunis à Munich pour y  proclamer solennellement leur unité face à une Russie revancharde et autocratique, accusée de menacer la jeune démocratie ukrainienne .

L’Ukraine, y avait on affirmé ,conservait pleinement son droit de rejoindre l’OTAN. Mais, par une étrange gesticulation ,les Américains, tout en hystérisant limminence de la guerre, proclamaient   à lavance quil ny prendraient aucune part - sauf par d’éventuelles sanctions économiques…Malgré la plaidoirie passionnée du président ukrainien Zelinsky ,également présent à Munich,et salué d’une ovation debout, la vérité crue était que son pays était  en fait prié par l’auguste assistance de se battre seul, cest-à-dire de se préparer à périr pour un principe, celui de la « porte ouverte » .

 

Un principe pourtant notoirement impraticable, chacun ayant conscience du risque de guerre depuis fort longtemps. Dès 2008 à Bucarest, Sarkozy et Merkel s’étaient opposés, pour cette raison ,à laccession de lUkraine et de la Georgie à lOTAN, que poussait à l’époque Obama. Mais le principe lui , était resté.

 Et Poutine,  profitant de la faiblesse des États-Unis après le retrait calamiteux de Kaboul et des divisions internes de ladministration Biden ,décida en décembre dernier, den finir une bonne fois avec l’élargissement de lOTAN à ses frontières,exigeant que les intérêts de sécurité de la Russie soient enfin entendus par les occidentaux.

 

Pendant toutes ces dernières semaines, une porte de sortie diplomatique était pourtant possible : coupler  un moratoire sur les futurs élargissements de lOTAN à des négociations sur les armements conventionnels et nucléaires en Europe. Les ukrainiens ,conscients du danger hésitèrent . Mais Biden et son Congrès pour une fois unis contre la Russie ,ne voulurent pas en entendre parler.

 

Au  final « Munich II «  aura donc produit la pire des issues possibles:  Bien entendu,tout élargissement ultérieur de l’OTAN est mort et enterré . D’ores et déjà ,la Russie a déjà empoché la Biélorussie, forcée d’« accueillir « 30 000 soldats russes sur son sol . Elle attend désormais le moindre prétexte venu de Kiev, pour semparer de la totalité de lUkraine.

En 2014, lors de la phase précédente de cette guerre de 8 ans, Obama avait réagi à  l’annexion de la Crimée avec mépris,  qualifiant la Russie de simple «  puissance régionale ». Poutine na jamais digéré linsulte. 

Faute davoir voulu apprendre les leçons de l’Histoire : qu’on ne construit pas la paix en humiliant, ni  en s’installant militairement sur les frontières du voisin, alors même que l’ on refuse par avance toute confrontation,les  Occidentaux, et d’abord les Américains,auront au final permis à Poutine  de commencer à réaliser son rêve le plus cher : rebatir lEmpire.

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