Idées et analyses sur les dynamiques politiques et diplomatiques.
10 Octobre 2025
Effarés ou carrément scandalisés, nombreux étaient ceux qui, en février dernier, avaient accueilli avec un mépris mêlé de moquerie l’ambition de Donald Trump de faire de Gaza une nouvelle « Riviera » sur la Méditerranée. Trump envisageait alors d’évacuer la population gazaouie vers d’autres pays arabes, dont l’Égypte et la Jordanie, pour y « trouver une zone magnifique pour y installer les gens de façon permanente dans de belles maisons, où ils peuvent être heureux, sans se faire tirer dessus, sans se faire tuer, sans se faire poignarder à mort comme ce qu’il se passe à Gaza ».
Et Trump d’ajouter : « Tous ceux à qui j’ai parlé adorent l’idée de voir les États-Unis posséder ce morceau de territoire, de le développer et de créer des milliers d’emplois avec quelque chose qui sera magnifique. »
Neuf mois plus tard, le plan de paix de Trump pour Gaza, qui vient d’être annoncé à l’occasion d’une nouvelle visite de Netanyahou à la Maison-Blanche, ne fait plus ricaner personne. Au contraire : comme un seul homme, les dirigeants musulmans d’Égypte, de Jordanie, du Qatar, de Turquie, du Pakistan, de l’Indonésie, et bien sûr, l’Autorité palestinienne, sans oublier le pape Léon XIV lui-même et même Emmanuel Macron, tous saluent le plan de Trump, tous s’engagent à le soutenir, et tous exhortent le Hamas à l’accepter immédiatement, comme l’a fait le Premier ministre israélien.
Il est vrai que le modèle « Riviera » a été quelque peu remanié par ses trois auteurs : le gendre de Trump, Jared Kushner, le père des Accords d’Abraham, Steve Witkoff, son ami et conseiller, et l’insubmersible ancien Premier ministre britannique Tony Blair.
Il n’est plus question pour les États-Unis de revendiquer la « possession » de Gaza, ni d’en expulser la population : bien au contraire, le point 12 du plan de paix précise que « personne ne sera forcé de quitter Gaza, et ceux qui souhaitent partir seront libres de le faire et de revenir. Nous encourageons les gens à rester et leur offrirons l’occasion de construire un Gaza meilleur ».
Sur le fond cependant, l’idée maîtresse reste la même : après avoir éliminé et démilitarisé le Hamas (dont les derniers combattants pourront soit partir, soit bénéficier d’une amnistie), il s’agira, sous l’autorité d’un « Comité palestinien apolitique » composé de technocrates, lui-même chapeauté par un « Conseil de la paix » présidé par Trump et incluant Blair, de reconstruire l’enclave en une zone franche prospère, grâce aux financements du Golfe. Le tout étant sécurisé par une « Force internationale de stabilisation ».
À la fois ambitieuse et novatrice, l’initiative américaine représente la première ébauche d’une vraie solution à la question palestinienne depuis le processus d’Oslo, brutalement stoppé par l’assassinat de Rabin et les attentats du Hamas… il y a trente ans.
Elle n’en recèle pas moins de nombreux obstacles. Du côté israélien, si les otages doivent être libérés en échange de l’élargissement de 2 000 terroristes palestiniens, et si le Hamas démilitarisé est exclu de la gouvernance de Gaza, nombre de questions se posent : quand et comment obtenir le retrait total des forces israéliennes ? Quid de la Cisjordanie, qui n’est pas mentionnée ? Et quid surtout du futur État palestinien, évoqué indirectement dans le plan Trump, mais dont Netanyahou, et plus encore ses ministres zélotes, ne veulent pas entendre parler ?
Mêmes incertitudes, en miroir, du côté palestinien : quand et comment réformer en profondeur l’Autorité palestinienne ? Comment obtenir le soutien des Palestiniens à un accord de paix préparé sans eux ? Et surtout, comment obtenir la capitulation du Hamas ?
Le chemin s’annonce donc difficile et semé d’embûches. Il suppose que chacun y contribue, or l’Iran, la Chine et la Russie se tiennent à l’écart. Il suppose aussi que des leaders visionnaires émergent, et qu’ils s’approprient le processus.
Pour devenir le Singapour du Proche-Orient, il manque aux Palestiniens un Lee Kuan Yew. L’homme qui, après le difficile divorce de la Malaisie musulmane en 1965, avait su faire de Singapour, un patchwork ethnico-religieux de Chinois, d’Indiens, de Malais et d’Européens, une nation soudée dans la réussite économique et la démocratie… cela sur un territoire de 714 km², le double de Gaza…
Pierre Lellouche – 1er octobre 2025
/https%3A%2F%2Fscontent-iad3-1.xx.fbcdn.net%2Fv%2Ft39.30808-1%2F485378239_679604844566704_1862450307612940491_n.jpg%3Fstp%3Ddst-jpg_tt6%26cstp%3Dmx640x640%26ctp%3Ds640x640%26_nc_cat%3D108%26ccb%3D1-7%26_nc_sid%3D3ab345%26_nc_ohc%3Dus8IDi9YTt0Q7kNvwEnqyA3%26_nc_oc%3DAdnxlSK1L8whTXn90e8RW341A1EmQnXDcVPnVW-a3TTa9_maW-NKL7OL8gsqtwuXgh68cbQG18plVbAxumDNEFnS%26_nc_zt%3D24%26_nc_ht%3Dscontent-iad3-1.xx%26_nc_gid%3DzXFBzWKo2G7QhxZ6oJ1Xuw%26oh%3D00_Afd7P0kDW5OcR0DbugKIU1ZW-CjcCXFN_0rlxaCQoeiKOA%26oe%3D68EF06AA)
Les Chantiers de la Liberté - Pierre Lellouche
Les Chantiers de la Liberté - Pierre Lellouche, Paris. 72 likes · 11 talking about this. Idées et analyses sur les dynamiques politiques et diplomatiques. Pierre Lellouche, ancien ministre parta...
https://www.facebook.com/people/Les-Chantiers-de-la-Libert%C3%A9-Pierre-Lellouche/61574127458930/