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Trump-Xi Jinping : l’inévitable guerre commerciale

Trump-Xi Jinping : l’inévitable guerre commerciale

Dans la guerre des tarifs douaniers déclenchée par Trump, tous s’étaient couchés, à commencer par l’Europe, mais également l’Amérique latine, l’Afrique et même l’Asie. Tous avaient consenti à l’extorsion, en moyenne 15 % de droits de douane supplémentaires, pour espérer continuer à être protégés ou à exporter sur le marché américain. Trump avait appelé cela « Libération Day ». Tous s’étaient couchés, sauf une puissance : la Chine.

La Chine, qui a d’abord riposté en décrétant des tarifs douaniers équivalents, forçant Trump à faire en partie machine arrière ; puis en stoppant purement et simplement toutes ses importations de soja américain (une perte sèche de 13 milliards de dollars pour les fermiers de l’Illinois, de l’Iowa, du Minnesota et de l’Indiana), immédiatement remplacés par les producteurs brésiliens. Rétorsion aussi, avec la décision de se passer des microprocesseurs de Nvidia que Trump avait pourtant hésité à vendre aux Chinois avant de s’y résoudre et de découvrir que Pékin n’en voulait plus, montrant ainsi qu’il pouvait produire une technologie au moins équivalente en Chine même. Cela avant un dernier coup de bambou plus douloureux encore : l’embargo sur les terres rares et surtout sur tout équipement qui pourrait en contenir, même en quantité infime, à commencer par les fameux aimants, indispensables dans les téléphones, les automobiles et jusque dans les missiles Tomahawk (convoités par l’Ukraine), la propulsion des drones ou dans les chasseurs F-35. Or 90 % de ces aimants sont fabriqués en Chine… Officiellement, les Chinois précisent qu’il ne s’agit pas d’un embargo, mais de simples « licences d’exportation » accordées pour un « commerce légitime », l’appréciation étant laissée, au cas par cas, aux seuls contrôleurs de Pékin…

L’annonce de ce nouveau dispositif jeudi dernier a déclenché une belle panique sur les deux rives de l’Atlantique, notamment dans les industries de défense et dans l’automobile, certaines firmes ayant dû stopper temporairement leur production après un premier embargo testé par les Chinois en avril dernier…

Fidèle à son habitude, Trump a réagi dès le lendemain en décidant d’imposer 100 % de droits de douane sur tous les produits chinois à compter du 1er novembre, et en menaçant même d’annuler sa rencontre prévue avec Xi, la veille 31 octobre en Corée, à l’occasion du sommet de l’APEC.

Deux jours plus tard, Trump changeait encore de registre : « Ne vous inquiétez pas pour la Chine. Ça ira très bien. Le très respecté président Xi traverse un moment difficile. Il ne veut pas de dépression dans son pays. Pas plus que moi… ».

Reste à savoir si, une fois de plus, les Américains ne se trompent pas sur la Chine, ses intentions et ses capacités.

Leur première erreur, de proportion historique, fut de laisser la Chine entrer dans l’OMC (l’Organisation mondiale du commerce) en 2001, avec l’idée que la Chine évoluerait grâce au commerce vers une économie de services, une classe moyenne majoritaire et donc la démocratie… Las, il s’est avéré que la Chine de Jiang Zemin était bien plus libre que celle de Xi, mais que ce dernier a multiplié par 15 la taille de l’économie chinoise. Deuxième erreur : la sous-estimation de la capacité d’innovation des Chinois qui pourtant ont apporté par le passé l’imprimerie, le compas, la porcelaine ou la poudre et le papier. La Chine d’aujourd’hui est au plus haut niveau en matière spatiale, en matière nucléaire, de drones, de missiles hypersoniques et bien sûr de batteries…

Au cœur de cette guerre commerciale, la vraie compétition se joue sur l’IA, qui déterminera qui dominera le monde de demain.

Pour l’heure, Trump se félicite d’avoir fait chuter les importations chinoises aux États-Unis de 27 % en un an, ce qui au passage est une catastrophe pour l’Europe qui voit arriver en masse les surplus chinois… Mais Trump et ses conseillers seraient bien avisés de relire le discours de Xi d’avril 2020 devant la Commission centrale des affaires économiques et financières, où le dirigeant chinois annonçait la couleur : « Nous devons resserrer la dépendance des chaînes industrielles autour de la Chine… et développer une capacité de représailles et de dissuasion contre toute tentative d’interruption par des puissances extérieures ».

Resserrer la dépendance, nous y sommes…

 

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M
Oui…<br /> Le constat dressé est inquiétant et de nombreuses autres inquiétudes s’ajoutent :<br /> La Chine voudrait diriger le monde en 2049, devenir la première puissance mondiale, détrôner les Etats-Unis. Elle le proclame ouvertement. Elle voudrait s’emparer de Taïwan en 2027, parait-il. Des bruits courent selon lesquels elle aimerait bien installer une base militaire en Nouvelle-Calédonie pour conforter ses intérêts stratégiques. La Chine avance ses pions partout et à tous les niveaux. Elle déploie sa « nouvelle Route de la Soie » dans ce contexte et essaie d’infiltrer les économies de tout un tas de pays. Notre Green Deal est en quelque sorte une soumission à ces intérêts chinois. Pour faire marcher leur économie et pour accroître leur influence, les Chinois –entre autres- inondent le monde d’éoliennes, de panneaux photovoltaïques, de voitures électriques, de pompes à chaleur, etc.<br /> Le bannissement progressif de la voiture thermique - une technologie auparavant maîtrisée par l’Europe avec une avance considérable sur la Chine, et que l’on veut sacrifier au nom du Green Deal, qui profite à la Chine - a juste récemment provoqué le licenciement de 51 000 personnes en Allemagne…tout cela avec l’assentiment de nos dirigeants.<br /> C’est la Chine aussi qui transforme 90 % des terres rares. De cette manière, elle contrôle cette industrie en quasi monopôle. L’industrie des terres rares –métaux, alliages et aimants - est une industrie particulièrement polluante, à l’extraction, à la transformation et pour s’en débarrasser ensuite.<br /> Mais, les terres rares sont indispensables dans toutes les nouvelles technologies et dans toutes ces énergies dites renouvelables.<br /> Il se trouve que le Green Deal dit écologique est plutôt néfaste pour l’environnement.<br /> De plus en plus rares sont les réflexions et les actions qui mèneraient vers une véritable protection de l’environnement et de notre planète.<br /> Dans ce contexte, il conviendrait peut-être d’examiner aussi le nouveau projet de barrage gigantesque chinois au Tibet censé obtenir trois fois la capacité du barrage de Trois Gorges…et qui pourrait en plus créer de nouvelles conflictualités avec l’Inde et aussi avec le Bangladesh.<br /> Pendant que les Khmers verts européens essaient de trouver des solutions pour réduire les déplacements de leurs concitoyens (même le permis de conduire à vie ne doit plus l’être), on réfléchit à comment faire voyager 1 milliard de Chinois qui n’ont jamais pris l’avion…<br /> On est prêt à sacrifier les agriculteurs français (Mercosur, etc.) sur l’autel du Green Deal (pour lequel des minerais sud-américains sont nécessaires).<br /> Dans ce contexte, la Macronie voudrait dépenser 300 milliards supplémentaires pour installer de l’éolien terrestre et off-shore (50 parcs tout autour de la France, sauf au Touquet), alors que la France n’a pas besoin de cette énergie supplémentaire et que 80 % de ces éoliennes seraient apparemment fabriquées en Chine.<br /> Tout cela parait particulièrement insensé à l’heure actuelle compte tenu de la situation budgétaire et économique française.<br /> Pour justifier l’installation des énergies renouvelables, on veut considérablement augmenter les besoins en énergie partout. D’où l’obsession pour la voiture électrique et la digitalisation du monde, extrêmement gourmande en énergie.<br /> L’obsession pour l’IA également, très énergivore, qui est certes artificielle, mais certainement pas intelligente. L’IA reste programmée par l’Homme…<br /> « Si internet était un pays, il serait le troisième plus grand consommateur d’électricité derrière la Chine et les Etats-Unis. »<br /> Un e-mail envoyé consomme autant d’énergie qu’une ampoule qui reste allumée pendant une heure.<br /> Quant à l’IA, des études américaines récentes commencent d’ailleurs à douter de sa rentabilité…<br /> Même si l’IA peut amener des progrès à la médecine, dans la recherche et dans l’industrie, il faut s’en méfier dans bien d’autres secteurs et utilisations.<br /> Le monde virtuel fait déjà des ravages dans nos sociétés.<br /> Les algorithmes ne sont pas infaillibles.<br /> Avec l’IA on peut fabriquer des mensonges. Avec l’IA on peut frauder. L’IA peut être détournée. Elle peut être utilisée dans une concurrence déloyale face à la création artistique humaine.<br /> Qui peut nous garantir qu’elle n’échappera pas à notre contrôle un jour ?<br /> En 1991, avec son film « Terminator II – Judgement Day », James Cameron nous avait adressé un avertissement et tout cela ne parait pas si anodin ou loufoque aujourd’hui.<br /> Récemment, des chercheurs américains ont pu constater que l’IA était capable de tricher aux échecs.<br /> Cela peut nous laisser dubitatifs…Si on peut programmer l’IA de façon à ce qu’elle puisse contourner les règles, il y a matière à s’inquiéter. Elle pourrait peut-être un jour contourner certaines mesures de sécurité mises en place pour nous protéger d’elle justement.<br /> Pour l’instant, l’IA pourrait surtout s’avérer très, très utile si on veut créer une société de surveillance orwellienne selon, notamment, le modèle chinois…<br /> On nous dit que la répression en Chine a rarement été aussi forte que maintenant sous Xi Jinping…les algorithmes jouent un rôle non-négligeable dans le contrôle du peuple chinois.<br /> Puis, il convient de reparler de la guerre en Ukraine qui a jeté la Russie encore plus dans les bras de la Chine, chose si redouté par Kissinger.<br /> Les Chinois s’en frottent les mains.<br /> Grace à la guerre en Ukraine, ils ont désormais libre accès aux hydrocarbures et aux matières premières russes à bas coût, desquels l’Europe s’est volontairement coupée, avec ses propres sanctions.<br /> Résultats des courses, la Chine essaie de vassaliser la Russie dans le cadre de ses efforts pour dominer le monde. Et l’Europe achète tout beaucoup plus cher. L’inflation s’est donc invitée en Europe.<br /> Bon nombre de ménages français n’arrivent même plus à se chauffer correctement. On en est là !<br /> 69 000 entreprises françaises ont mis la clé sous la porte dernièrement.<br /> L’économie française est étranglée par la fiscalité déraisonnée dans notre pays, par des charges illogiques et des normes françaises et bruxelloises absurdes. Les prix de l’énergie qui ont explosé, encore une fois, à cause de la guerre en Ukraine, ont fait le reste.<br /> Seules les grandes entreprises multinationales peuvent encore tirer leur épingle du jeu, mais au grand dam des TPE et des PME qui devraient pourtant être à la base de la production et de la création en France.<br /> Depuis le COVID, on nous pousse, en plus, vers le e-commerce au détriment des commerces de proximité et de l’artisanat traditionnel. Les petites et moyennes entreprises ne peuvent plus survivre et le pouvoir d’achat des Français baisse continuellement.<br /> Une nouvelle fois, on nous présente une solution toute trouvée : Buy Chinese !!!<br /> Désormais, la « fast fashion » chinoise c’est même installée au BHV.<br /> La créativité française –dans les plus hautes sphères politiques - se réduit désormais à l’invention de nouvelles taxes…alors que la France bat déjà tous les records au niveau de l’imposition.<br /> <br /> Alors qu’un processus de paix est engagé, et que nous savons que la guerre en Ukraine renforce le bloc sino-russe et qu’elle fait des dégâts considérables en Europe à tous les niveaux (et des morts !), Ursula von der Leyen tient apparemment à ce que cette guerre continue pour des raisons toujours aussi opaques.<br /> On peut d’ailleurs attribuer sa capitulation écossaise à sa volonté de prolonger cette guerre. Pour la prolonger elle a donc tout accepté face à Donald Trump. Les 15 % de droits de douane, 600 milliards d’investissements européens aux Etats-Unis et, bien entendu, l’achat de gaz américain pour un montant de 750 milliards…parce que, oui, du gaz, il en faut quand même… il faut bien remplacer le gaz russe.<br /> Dans ce contexte, on peut se demander également quelles sont les concessions que la France pourrait être prête à faire - ou qu’elle a déjà faites - à des pays exportateurs de gaz comme le Qatar ou l’Algérie…<br /> <br /> Marion Winter, le 08/11/2025
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P
Merci encore pour cette longue analyse de qualité.